Fria (Guinée) – La ville de Fria a accueilli les 5 et 6 décembre 2025 le tout premier séminaire international consacré à l’autisme jamais organisé en République de Guinée, une initiative qui pourrait marquer un tournant dans la prise en charge des troubles du spectre autistique (TSA) dans le pays. Organisé par la Fondation Salim pour les Enfants Autistes, l’événement a réuni responsables gouvernementaux, acteurs de la société civile, spécialistes et familles confrontées au manque de structures adaptées.
Un événement inédit dans un pays où l’autisme reste largement méconnu
Représentant le Préfet de Fria, M. Amara Bangoura a ouvert le séminaire en soulignant la portée historique de la rencontre :
« La préfecture de Fria a l’insigne honneur d’abriter le premier séminaire sur l’autisme organisé en République de Guinée. Cet événement est d’une importance capitale pour notre pays. »
En Guinée, comme dans de nombreux États d’Afrique de l’Ouest, l’autisme reste peu compris, et largement sous-diagnostiqué. L’absence de professionnels spécialisés et de centres éducatifs adaptés limite fortement l’accès au dépistage, à l’accompagnement et aux stratégies d’inclusion scolaire.
Une initiative née d’un parcours personnel
À l’origine du séminaire se trouve Mme Mariama Aisha Barry, fondatrice de la Fondation Salim et mère d’une jeune femme autiste.
Basée en Irlande, elle a fait de son expérience personnelle un levier d’action :
« J’ai connu le manque d’accompagnement, le manque de réponses et le manque de structures adaptées. Ma motivation est de donner aux autres ce que j’aurais voulu pour ma fille. »
La Fondation Salim, encore jeune mais déjà active, ambitionne de structurer un réseau de formation et de sensibilisation à l’échelle nationale.
Le soutien des institutions et l'appel à une politique nationale
Parmi les participantes, Mme Fingui Camara, Conseillère nationale au CNT, a rappelé les carences du pays en matière d’information sur les TSA :
« L’autisme est encore très méconnu. Ce séminaire permettra aux participants d’acquérir des compétences pour informer d’autres personnes et mieux accompagner les familles. »
Elle a plaidé en faveur d’un engagement plus ferme de l’État dans l’élaboration d’une politique publique dédiée.
Présente également, Mme Souadou Baldé, Directrice Générale du Patrimoine Bâti de l’État, a insisté sur l’enjeu sociétal :
« Ce n’est pas la différence qui crée l’exclusion, mais le manque de soutien. Les personnes autistes vivent avec nous, travaillent avec nous, apprennent avec nous. Nous devons multiplier les initiatives pour leur intégration. »
Former, informer, inclure : un besoin urgent
Animé par des experts internationaux, le séminaire a abordé les signes de l’autisme, les parcours pédagogiques adaptés et le rôle essentiel des familles, éducateurs et professionnels de santé.
Plusieurs organisations, dont l’Union des Consommateurs de Guinée représentée par Elhadj Boubacar Mitty Barry, ont pris part aux échanges.
Pour les participants, les besoins sont clairs :
- former massivement les enseignants et le personnel de santé ;
- ouvrir des centres spécialisés dans les principales régions du pays ;
- lancer des campagnes nationales de sensibilisation ;
- soutenir les familles souvent isolées et financièrement démunies.
Un enjeu continental
Selon les estimations de l’OMS, les troubles du spectre autistique concernent environ 1 % de la population mondiale, mais leur reconnaissance demeure faible dans de nombreux pays africains, où le diagnostic précoce et les services spécialisés sont très limités.
La Guinée ne fait pas exception.
Les experts appellent à inscrire la question dans les priorités de santé publique, une démarche déjà amorcée au Rwanda, en Afrique du Sud et au Maroc, où des programmes pilotes ont été développés.
Vers un mouvement national pour l’inclusion
Pour les organisateurs, ce premier séminaire pourrait constituer la base d’un mouvement national en faveur de l’autisme.
« L’inclusion doit être un engagement collectif », a rappelé Mme Baldé.
La Fondation Salim espère désormais transformer cette mobilisation inédite en actions durables, dans un pays où les familles restent le plus souvent livrées à elles-mêmes.
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